Quand j’ai découvert Ikéa, j’avais moins de 20 ans et à peine trois francs en poche (oui, c’était encore des francs, je vous laisse décider si je suis vieille).
Je suis tombée en amour tout de suite. Pour moi qui n’avais jamais mis les pieds dans un magasin d’ameublement ou de déco (campagnarde innocente que j’étais), c’était carrément Noël : clair, coloré, vivant, chaleureux, foisonnant… j’avais envie de tout. Je suis repartie avec un lot de dessous de plat en liège, du papier cadeau brillant, et le CATALOGUE (à dire avec une musique dramatique et des paillettes dans les yeux).
Ah ce catalogue ! Prenez une étudiante fauchée, sans télé, dans un appart de 24 mètres carrés, donnez-lui un catalogue Ikéa, et regardez-la rêver pendant des heures. « Et un jour j’aurai un séjour avec tout un mur de bibliothèques, et moi aussi je ferai pousser des plantes dans ma cuisine, et qu’est-ce que c’est beau ce fauteuil à bascule en rotin... »
Le catalogue Ikéa (musique dramatique, paillettes), c’était mon livre de chevet et ma lucarne heureuse : un monde où tout est rangé mais pas trop, où les familles sont heureuses, où on s’attable à 12 sur des bancs de bois blond, toutes générations et couleurs confondues, où on a le droit de s’affaler sur des canapés confortables sous des plaids moelleux, où le linge de lit rend forcément les rêves plus beaux.
Le catalogue Ikéa, c’était ma référence et mon objectif de déco (soyez indulgents, je vous parle d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître).
Au fil des ans, le catalogue Ikea était mon petit plaisir de la rentrée. Pages cornées, mesures notée sur une marge.
Et même en ayant élargi mon horizon (et mes envies) en matière de déco, ce catalogue est resté le pavé incontournable de la rentrée.
Pourtant cette année en feuilletant mon catalogue préféré, léger sentiment de malaise. Rapidement transformé en massif « what the fuck Ikéa?? »
Vous voyez de quoi je parle ou pas ?
Les petites phrases, là, partout.
Saupoudrées, des sentences qui alternent entre coaching de vie niais et philosophie interstellaire.
Certaines flirtent avec le ridicule, d’autres copulent carrément avec.
Par exemple dans le genre « enfoncez-moi cette porte ouverte ! » :
« En pâtisserie, l’essentiel est de s’amuser, d’être créatif… et bien sûr, de manger de délicieux gâteaux« .
Façon hédonisme citadin :
« Même en plein coeur de la ville, vous pouvez redécouvrir que la nature est un don – et en déguster les fruits »
Dans la catégorie « ma grand-mère a du écrire celui-là » :
« Avec de bons récipients et des recettes astucieuses, les restes de ce soir donnent naissance au déjeuner ou au dîner de demain« .
Section « courrier du coeur » :
« Vous aimez les canapés moelleux, il les préfère plus fermes… Avec deux canapés différents, vous pourriez bien vivre heureux pour toujours. »
Enfin dans le genre « je suis un catalogue qui se prend tellement pour un magazine qu’il croit qu’en disant de tout acheter personne de verra à quel point c’est abusé » :
« Choisissez le meilleur matelas, les oreillers les plus confortables et le linge de lit le plus doux, et vous êtes bien parti pour enfin dormir comme vous en avez besoin« .
Quel stagiaire new age a pondu ces inepties ? Quel responsable doux-dingue le lui a demandé ? Et surtout, quel patron forcément pas net a laissé faire ?
Ikéa, quoi. Ikéa dont le catalogue est tiré chaque année à plus d’exemplaires que quasiment tous les ouvrages de l’univers.
Ikéa qui a su s’imposer massivement sur la planète avec son bon sens scandinave, ses petits prix et ses noms à coucher dehors.
Ikéa qui propose des campagnes de pubs souvent réussies et parfois très drôles.
Non mais Ikéa, quoi !
Est-ce pour surfer sur la mode du feel good et des magazines dédiés à l’épanouissement personnel ? Ou Ikéa ambitionne-t-il de devenir une nouvelle religion, dans laquelle on résoud tous les problèmes à coup d’assiettes à pois et de dressings éclairés de l’intérieur ?
Un journaliste de Slate a envisagé l’évangile selon saint Ikéa… je vous invite à le lire ici, c’est drôle et il pourrait faire de nouveaux adeptes !
De mon côté je vais aller m’affaler sur mon canapé Soderhamm, sous mon plaid Bjursta, et entamer une réflexion sur ce monde de consommation et la façon dont nous sommes manipulés par des multinationales prêtes à tout pour étendre leur emprise. Et même parfois à aller un peu loin dans le ridicule, peut-être juste pour faire parler de soi ?
Mais pas trop tard, demain je dois monter un lit Kura.
Tu me rassures, j’ai eu le même sentiment que toi pour la première fois. Moi qui me jette chaque année au 15 août sur leur nouveau catalogue, cette fois je n’ai pas accroché aux petites phrases limite moralisatrices…
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Ah ben oui, ça me rassure aussi ! Je me suis demandé si ça avait toujours été comme ça, parce que là c’est la première fois que ça me choque… Daljaa en-dessous dit que ça a toujours été le cas !
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Haha 🙂 Bon, je commence par te dire que tout pareil, j’ai connu Ikea au même moment, dans les mêmes conditions, avec la même ferveur. Et franchement, je suis toujours aussi fan, le catalogue c’est ma bible, et mon mec se fout de moi parce que si je pouvais, j’y serais toutes les semaines.
Bon par contre, ces phrases à la noix, moi je trouve qu’elles ont toujours été là. C’est ça qui a toujours fait la particularité d’Ikea : te faire réaliser que t’es un gros relou compliqué, et qu’en fait la vie, le bonheur que dis-je, c’est simple et pas cher.
Le suédois est bon : chez Ikea il y a tout, les meubles, la déco, la papeterie, la bouffe exotique… Et le parcours fléché que t’as pas intérêt à essayer de trouver un raccourci sinon tu tombes dans un vortex inconnu. Et dans ce temple de la vie parfaite tellement facile que tu n’y avais pas pensé, tu ressors toujours avec un truc, même le moins cher, parce que c’est OK d’acheter le moins cher chez Ikea puisque tout est génial de toutes façons, ils sont comme ça.
Allez, je leur en veux pas, ils sont tellement forts que j’ai même pas la sensation d’être prise pour un jambon.
Et enfin : je n’ai jamais eu de dispute de couple autour d’un montage de meuble. Quand il y a un truc Ikea à monter, je suis en mode « cassez-vous tous, il est pour MOI » 😀
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Raaaah une copine loveuse de Ikea… Tu crois qu’on aimerait autant si on n’avait pas découvert Ikéa dans ces conditions ??
Je me suis vraiment posé la question, pour les petites phrases. Mais comme le nouveau catalogue chasse l’ancien, j’ai pas pu vérifier, le vieux était déjà parti se faire recycler 😦 (Ouais, jsuis fan, mais pas au point de garder les vieux catalogues hahaha)
Pour toi c’était déjà à ce point dans les anciennes versions ? Dans ce cas, ptet c’est moi qui ai changé alors ?
Bon, moi aussi je les aime quand même. Et nous non plus, on ne se dispute pas au moment du montage. On est ceinture jaune et bleue troisième dån en montage Ikéa 🙂
j’ai monté un lit superposé y’a 2 semaines, moi, nananaa !
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J’ai feuilleté plusieurs fois le catalogue et je n’ai pas du tout remarqué les phrases ! Je dois vraiment feuilleter cela trop vite !
Merci en tout cas car cela m’a bien fait sourire !
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C’est la beauté du catalogue Ikéa, une lecture à plusieurs niveaux !
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http://www.slate.fr/story/106419/catalogue-ikea-grand-livre-sagesse
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Je vois seulement après coup que le lien est cité dans l’article… Désolée pour le doublon !
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Pas de souci, il est bon cet article !!
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Je suis pas de la même génération mais j’ai plus de 20 ans ^^…
Moi j’ai découvert Ikea à travers son catalogue avant même le magasin (j’ai tjrs été une fan du feuilletage de catalogues et pubs en tout genre…) Le catalogue d’Ikea se dispute en bonne place avec la Redoute mais le plus d’Ikea c’est d’avoir un magasin (où tout semble possible…!
et j’ai aussi été choquée par ces phrases sentencieuses « faites comme ci et vivez comme ça »… Mais l’admiration demeure … 🙂
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Y’a comme une magie quand on feuillette un catalogue, n’est-ce pas ? Tout y est si parfait…
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Rooh merde… y’a des gens pas de ma génération qui ont plus de 20 ans… rooh le coup de vieux !!
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Non mais tout va bien : il me semble que vous êtes plus jeune que ma mère, qui n’est pas vieille, bien sûr, en toute objectivité =D !
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Et en plus tu me vouvoies… *desespoir total, vais mettre mon antiride et me coucher*
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M’enfin si je TE (faut que je m’habitue à tutoyer des gens que je ne « connais » pas…) dis que tout vas bien… Une vieille dame ça se couche bien avant …
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Moi aussi, ça m’a dérangée… le côté « moralisateur new wave vivez comme ça » ça existait déjà il me semble, mais là ça prend trop de place par rapport à ce qui nous intéresse vraiment, et surtout des fois c’est des tournures de phrases limites, ça sent la traduction vite fait… peut-être pour ça qu’on tique ! En plus cette année, pour la première fois de ma vie (et on doit être de la même génération), j’ai pas aimé le catalogue. Je l’ai même pas lu en entier. Il me tombe des mains, rien à faire, je sais pas trop pourquoi. Une bonne partie du charme s’est envolée…
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Ah alors toi aussi tu trouves que c’est pire cette année ? Ou alors tu crois qu’on est moins tolérantes ?? Ikéa quoi… Moi je ne dirais pas que je ne l’ai pas aimé, mais c’est sur qu’il y a nettement moins de paillettes dans mes yeux.
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Pour moi limite je voie le coaching de vie avant les meubles là donc ça m’énerve et j’ai plus envie de regarder. Surtout qu’il y a un autre catalogue trop cool pour s’endormir maintenant, je crois que c’est leroy merlin ou une enseigne du genre, superbe
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Ikea, le MacDo de l’ameublement.
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Vazy sors ta moustache et fais Bové !!
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